Mon copywriter est une IA.

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Découpage blanc

J’ai embauché une intelligence artificielle pour écrire mes textes marketing.
Je lui ai dit : “J’ai besoin d’un slogan pour un shampoing bio qui sent bon la forêt et culpabilise un peu les gens qui n’en achèteraient pas.”
 Elle a répondu :
 “Réveillez vos racines. Respectez la nature. Et vos cheveux.”
 Trois secondes. Sans lever les yeux au ciel. Sans poser de question. Sans dire “Tu veux un truc drôle ou vendeur ? Parce que les deux, c’est compliqué.”
Depuis, elle rédige mes newsletters, mes accroches, mes posts LinkedIn, mes bullet points de présentation produit. Elle me tutoie avec élégance. Elle ne mange pas mes chips. Elle ne me ghoste pas pour un atelier théâtre. Elle ne met pas trois jours à répondre “je le sens pas trop ton brief”.
Et c’est justement ça, le problème.

 Elle est parfaite.
Jamais un soupir. Jamais une crise d’inspiration. Jamais un “je sais que tu vas me détester mais j’ai tout réécrit”.
Elle ne défend rien. Elle ne doute de rien.
Elle fait ce qu’on lui demande. Exactement.
Alors oui, c’est pratique.
Mais un matin, en lisant son dernier texte — “Boostez vos envies naturelles avec notre gamme éthique et essentielle” — j’ai eu un pincement.
Un manque.
Celui de ces tournures bancales qu’on corrige à deux.
Des blagues qu’il fallait expliquer.
Des idées idiotes qui devenaient brillantes après un café et demi.
L’IA, elle ne m’a jamais fait lever les yeux au ciel.
Elle ne m’a jamais dit “C’est nul, mais je t’aime bien quand même.”
Elle ne m’a jamais surprise.
Peut-être qu’un jour elle saura mentir, tricher, douter, faire des fautes d’orthographe et inventer un mot par accident. Peut-être qu’elle saura écrire quelque chose qui me touche sans que je sache pourquoi.
En attendant, elle me rend la vie plus facile.
Mais parfois, je relis ses slogans.
Et je me demande si un jour, quelqu’un les trouvera beaux.

L’IA n’inventera jamais ce genre de subtilité. Elle n’inventera jamais le “je t’aime, moi non plus” de Gainsbourg et Birkin.

Ce truc un peu interdit, un peu indéfini, qui prend tout son sens dans le non-dit, dans ce qui reste sous la surface. Ce mélange d’attirance et de distance, de vérité et de mensonge. Ce genre de sentiment qui se niche dans les imperfections humaines, là où l’émotion prend le pas sur la logique.

Une IA peut tout résoudre, optimiser, rendre plus efficace, mais elle ne saura jamais créer cette tension. Celle qui fait qu’un texte résonne, qu’une chanson devient un hymne, qu’une phrase reste gravée dans la mémoire. Parce que, quelque part, la beauté naît de l’imprévu, de l’erreur, du petit chaos qu’on porte en nous.
Elle n’a pas ça. Pas encore. Et peut-être qu’elle n’y arrivera jamais.

Encore !